Des institutions africaines et des agences mondiales de notation ont réaffirmé leur engagement à construire un écosystème de notation de crédit équitable, transparent et inclusif pour l’Afrique.
Avec plus de 30 pays africains soumis à des notations de crédit souverain, les décisions des agences de notation internationales ont un impact considérable sur la viabilité de la dette et l’accès aux marchés financiers mondiaux. Lors d’un dialogue de haut niveau en marge des Réunions de printemps 2025 du FMI et de la Banque mondiale, des institutions africaines et des agences mondiales de notation ont réaffirmé leur engagement à construire un écosystème de notation de crédit équitable, transparent et inclusif pour l’Afrique.
Organisé par le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP) de l’Union africaine, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), AfriCatalyst et le Centre africain pour la transformation économique (ACET), et accueilli par les Fondations Open Society, ce dialogue a rassemblé des représentants de haut niveau de Moody’s, S&P et Bank of America pour un échange franc sur les solutions de financement pour les pays africains.
Dans un contexte de volatilité accrue des marchés, de défauts souverains et d’espaces budgétaires limités, le dialogue visait à engager des réformes urgentes du cadre africain de notation de crédit. Les intervenants ont identifié des obstacles structurels tels que les lacunes en matière de données, l’opacité méthodologique et le manque d’interaction entre les gouvernements africains et les trois grandes agences de notation (Moody’s, S&P et Fitch).
L’ambassadeur Claver Gatete, Secrétaire exécutif de la CEA, a souligné le paradoxe du financement en Afrique, un PIB combiné de plus de 3 000 milliards de dollars, mais seulement deux pays notés en catégorie investissement, et a insisté sur la nécessité urgente de réformes. “Un écosystème de notation de crédit sain dépasse l’évaluation du risque, il devient une plateforme de mobilisation des capitaux, d’amélioration de la solvabilité et de soutien aux objectifs de développement de l’Afrique”, a-t-il déclaré.
“Nous devons repenser la manière dont la solvabilité est définie et mesurée”, a affirmé le Dr Raymond Gilpin, économiste en chef du PNUD Afrique, s’exprimant au nom de Mme Ahunna Eziakonwa, Directrice régionale du PNUD pour l’Afrique. “Au PNUD, nous croyons qu’une approche centrée sur le développement est essentielle pour aider les gouvernements à renforcer leurs institutions, améliorer leurs systèmes de données et engager efficacement le dialogue avec les agences de notation”.

Les économies africaines sont confrontées à des défis croissants en matière de notation, notamment des perceptions de partialité, un manque de transparence et des incohérences méthodologiques. Le Dr Misheck Mutize, expert principal en notation de crédit au MAEP, et la Dr Zuzana Schwidrowski, Directrice de la macroéconomie, de la gouvernance et des finances à la CEA, ont proposé des solutions visant à renforcer la capacité des gouvernements africains à répondre aux notations inexactes ou injustes, et ont présenté les premières étapes vers la création d’une Agence africaine de notation de crédit, destinée à compléter et à élargir la couverture actuelle.
” AfriCatalyst est fière d’être au cœur de ce dialogue crucial, en s’appuyant sur notre Initiative sur les notations de crédit avec le PNUD “.
M. Roberto Sifon-Arevelo (S&P Global Ratings), M. Jorge Valez (Moody’s Ratings), et Dr Tatonga Rusike (économiste en chef Afrique chez Bank of America) ont exposé des pistes pour corriger les problèmes de perception du risque et œuvrer avec les banques et les investisseurs pour renforcer les capacités et la compréhension des méthodologies de notation. Ils ont également souligné que, même si les notations souveraines ne sont pas l’unique critère des investisseurs, elles influencent fortement les coûts d’emprunt, la confiance des marchés et l’accès aux capitaux.
“Étant donné les pressions persistantes sur les gouvernements africains en matière de coût et d’accès aux capitaux, il est essentiel que les notations de crédit reflètent la diversité des contextes africains. Cette initiative est une étape importante à cet égard – notamment en engageant les agences de notation”, a partagé Mme Mavis Owusu-Gyamfi, Présidente-directrice générale d’ACET.
“L’Agence africaine de notation de crédit (AfCRA) n’est pas créée pour accorder des notes favorables aux entités africaines, mais pour offrir une diversité d’avis qui permettent une évaluation plus précise des souverains, entreprises et collectivités africains “, a affirmé le Dr Mutize. “Notre priorité est de construire une institution crédible, indépendante et durable, qui joue un rôle essentiel dans le développement des marchés de la dette intérieure et dans la revalorisation de la position de l’Afrique au sein de l’architecture financière mondiale.”
Dans ses remarques finales, le Dr Daouda Sembene, CEO d’AfriCatalyst, a souligné l’importance de la collaboration entre les institutions africaines. “AfriCatalyst est fière d’être au cœur de ce dialogue crucial, en s’appuyant sur notre Initiative sur les notations de crédit avec le PNUD. Nous sommes optimistes : grâce à une collaboration renforcée entre les institutions africaines et les agences mondiales de notation, nous pouvons favoriser un écosystème de notation plus précis, robuste et représentatif, un système qui autonomise les nations africaines et promeut une croissance durable”.
Les messages clés incluaient la nécessité de :
- renforcer les échanges transparents et réguliers entre agences de notation, investisseurs et gouvernements africains ;
- mettre en avant des récits institutionnels forts qui reflètent la résilience du continent et ses efforts de réforme ;
- développer les capacités locales et encourager la collaboration, en particulier à travers la future Agence africaine de notation de crédit, qui fournira des alternatives crédibles et contextuelles aux notations mondiales.
Alors que l’Afrique du Sud assure la présidence du G20 et que l’Union africaine devient membre permanent en 2025, l’appel à une solution africaine en matière de notation de crédit prend une importance accrue. Les conclusions de ce dialogue contribueront aux efforts en cours pour réformer l’architecture financière mondiale et faire en sorte que les capitaux africains servent mieux le développement du continent.