Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies a tiré la sonnette d’alarme : des millions de personnes en Afrique de l’Ouest et centrale font face à une faim record alors que les conflits, les déplacements, les difficultés économiques et les épisodes répétés d’événements climatiques extrêmes plongent la région dans une crise majeure.
Plus de 36 millions de personnes peinent déjà à satisfaire leurs besoins alimentaires de base, un chiffre qui devrait dépasser 52 millions durant la saison de soudure, entre juin et août, selon les dernières analyses.
Cela inclut près de trois millions de personnes en situation d’urgence alimentaire, et 2 600 personnes au Mali exposées à un risque de famine catastrophique.
Bien que les besoins atteignent un niveau historique, les ressources disponibles sont limitées, mettant en jeu la vie de millions de personnes.
« Sans financement immédiat, le PAM sera contraint de réduire davantage le nombre de bénéficiaires ainsi que la quantité de vivres distribués », a déclaré Margot van der Velden, directrice régionale du PAM pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.
Une situation « extrêmement difficile et critique »
En 2019, seulement 4 % de la population était en insécurité alimentaire, contre 30 % aujourd’hui, selon Ollo Sib, conseiller principal en recherche au PAM.
« Nous espérons que notre appel sera entendu, car la situation de la sécurité alimentaire dans le Sahel reste extrêmement difficile et critique », a-t-il déclaré depuis Dakar lors d’un point de presse à Genève.
M. Sib s’est récemment rendu dans plusieurs zones touchées, notamment dans des communautés du nord du Ghana confrontées à une sécheresse sans précédent.
« Ils ont dû replanter deux à trois fois, et pour eux, chaque semis raté représente une charge financière supplémentaire, car le coût des engrais et des semences y est très élevé », a-t-il expliqué.
L’équipe d’évaluation s’est également rendue dans le nord du Mali, seule zone de la région où des personnes sont confrontées à une insécurité alimentaire catastrophique.
« Nous avons échangé avec des éleveurs qui, en temps normal, vendent leur bétail pour acheter des céréales », a-t-il rapporté.
« Cette année, ils étaient inquiets car le prix des denrées alimentaires a augmenté de 50 % par rapport à la moyenne des cinq dernières années. Et dans le même temps, ils n’ont pas accès aux marchés pour vendre leurs produits. »
Conflits, inflation alimentaire et inondations
Le PAM indique que les conflits persistants figurent parmi les principales causes de l’aggravation de la faim en Afrique de l’Ouest et centrale.
Les combats ont déplacé plus de 10 millions de personnes vulnérables dans la région, dont plus de deux millions de réfugiés et demandeurs d’asile au Tchad, au Cameroun, en Mauritanie et au Niger.
Près de huit millions de personnes supplémentaires sont déplacées à l’intérieur de leur propre pays, principalement au Nigéria et au Cameroun.
Par ailleurs, l’inflation alimentaire, exacerbée par la hausse des prix des denrées et des carburants, pousse les niveaux de faim vers des sommets inédits.
En parallèle, les événements climatiques extrêmes récurrents « érodent la capacité des familles à subvenir à leurs besoins alimentaires », déclare le PAM.

Cinq millions de personnes risquent de perdre leur aide
Le PAM se dit prêt à intensifier son assistance vitale en Afrique de l’Ouest et dans le Sahel. L’agence onusienne cherche à mobiliser 710 millions de dollars pour soutenir ses opérations jusqu’à fin octobre.
L’objectif est d’atteindre près de 12 millions de personnes cette année avec une aide cruciale.
Jusqu’à présent, les équipes ont déjà apporté leur aide à trois millions des plus vulnérables, dont des réfugiés, des déplacés internes, des enfants de moins de cinq ans souffrant de malnutrition, ainsi que des femmes et des filles enceintes ou allaitantes.
L’agence avertit que cinq millions de personnes risquent de perdre leur aide si des financements urgents ne sont pas trouvés.
S’attaquer aux causes profondes
Le PAM appelle également les gouvernements et les partenaires à investir dans des solutions durables visant à renforcer la résilience et à réduire la dépendance à long terme à l’aide humanitaire.
Depuis 2018, l’agence onusienne travaille avec les gouvernements de la région pour s’attaquer aux causes profondes de la faim, notamment via un programme ayant permis la réhabilitation de plus de 300 000 hectares de terres, au bénéfice de plus de 4 millions de personnes dans plus de 3 400 villages.